Marius Hamelot, un ambassadeur du IN qui tient le haut du pavé
Le 26 avril 2022A Aubervilliers, ce jeune entrepreneur transforme des déchets plastiques en revêtements muraux, mobilier ou objets décoratifs. Une activité en plein développement qui emploie déjà une vingtaine de salariés. En attendant mieux puisqu’après avoir décroché un premier contrat lié aux Jeux de 2024, ses ambitions sont à la mesure de la révolution durable qu’il a enclenchée.
Du Kenya à Aubervilliers, il y a peu plus d’un seul pas, mais bien quelques pavés. Et le chemin d’une réussite industrielle tracé par Marius Hamelot, ambassadeur du IN, créateur d’un nouveau matériau baptisé « Le Pavé® » entièrement constitué de déchets plastiques récupérés et transformés en bordure du Canal de Saint-Denis. Là où il y a quelques années s’activait une chaudronnerie-tôlerie se tiennent désormais des silos roses qui stockent les copeaux de matière plastique en tous genres : bouteilles de shampooing, gaines électriques, bouchons de bouteilles… « Tout ce que vous voyez ici, c’est effectivement la suite d’un projet étudiant mené dans le cadre de l’École d’architecture de Versailles, raconte Marius Hamelot, le jeune créateur de la « SAS Minimum » en charge de fabriquer, développer et commercialiser Le Pavé®. En 2016, on devait concevoir un campus au Kenya, en s’appuyant sur des ressources locales et renouvelables. Et, c’est là qu’on a découvert une immense décharge à ciel ouvert et qu’on s’est demandé comment recycler ces masses de déchets plastiques sans générer de nouveaux déchets, comme c’est le cas, par exemple, pour les bouteilles en plastique qui nécessitent l’apport de plastique neuf. Ce qu’on propose, alors, avec notre solution, c’est d’arrêter d’enfouir des déchets qui polluent nos sols sans aucune plus-value. » Pari tenu : pour le moment, SAS Minimum recycle une tonne de déchets plastiques par jour collectés par différents partenaires, ce qui lui permet de créer 100 m2 de son matériau sous forme de plaques.
Sous vos fesses, le recyclage…
Une solution qui a cependant nécessité quelques flambées expérimentales de plastiques avant que la fumée blanche ne sorte, marquant la création de l’actuel Pavé®, matériau entièrement écoresponsable puisque produit selon un procédé de « thermocompression qui ne demande pas d’ajout de résine », synthétise Marius Hamelot. Remarquez, avec 4,5 millions de tonnes de déchets plastiques, soit 66,6 kg par personne, générés en France (chiffres du WWF pour 2016), il y avait largement de quoi faire… Et de quoi le montrer : « Exposer clairement, par la couleur, que nos produits sont issus du recyclage, c’est hyper-important, poursuit le jeune entrepreneur de 28 ans. Si on recycle et qu’on ne le voit pas, on n’aura effectué qu’une partie du travail. Notre objectif, c’est bien de créer une plus-value avec le déchet, mais aussi de la rendre esthétique. Lorsqu’on remplit notre poubelle jaune, on ne sait pas ce que deviennent nos déchets. Là, on voit la réutilisation sous nos yeux. »
Ou sous nos fesses… Puisque le procédé novateur et inédit de la SAS Minimum a persuadé le promoteur Bouygues de jouer la carte ultra-locale et écoresponsable pour équiper en sièges deux des futurs équipements des JO 2024 que le promoteur est chargé de construire : l’Arena de la Porte de la Chapelle et le Centre aquatique de Saint-Denis. Un siège dont le prototype trône d’ailleurs déjà à Aubervilliers et vient aussi d’être installé en test à Saint-Ouen dans les tribunes du Stade Bauer, antre du Red Star. Moucheté, il porte la trace de l’équivalent de 3300 bouchons de bouteilles plastique recyclés. D’ailleurs, vous pourrez bientôt pousser vous-même le bouchon du recyclage puisque des collecteurs de bouchons dédiés à la création de ces sièges seront implantés dans différentes écoles et lieux publics de Seine-Saint-Denis et d’Ile-de-France. Un objet conçu en collaboration avec Lemon Tri, autre ambassadeur du In, qui à Pantin et Marseille trie, compresse et conditionne plus d’une trentaine de types de déchets différents afin qu’ils soient directement exploitables pour les filières de la revalorisation.

Vers des solutions de construction écoresponsables
Dont justement la SAS Minimum qui a fait ses premières armes, non loin de là, au sein de la Cité Fertile de Pantin où elle était incubée au sein d’Incoplex 93, l’accélérateur d’impact dédié à des entreprises de l’économie sociale et solidaire. « Une expérience qui nous a fait découvrir l’ampleur de l’énergie créative qui existe en Seine-Saint-Denis, explique Marius Hamelot, grandi dans un petit village breton à côté de Vitré. C’est pour cela qu’on tient à rester dans ce département qui ne fait que commencer à s’appuyer sur la dynamique des Jeux de 2024 et des constructions du Grand Paris ».
De quoi voir grand et installer un peu partout les plaques du Pavé® aussi simples d’utilisation que le bois. « Mais, on ne s’arrêtera pas là, parce qu’on peut tout imaginer à partir de notre procédé, aussi bien des tuiles, que du carrelage, du bardage et pourquoi pas remplacer le Placoplatre qui est partout dans la construction. C’est en tout cas ce qui nous permettra d’augmenter notre impact social parce qu’après avoir développé dans un premier temps notre procédé industriel, notre volonté c’est également de former, recruter des personnes éloignées de l’emploi. »
Car, la SAS Minimum en jetant ses pavés dans la mare d’un modèle de développement à bout de souffle a bien l’intention de faire le maximum pour un monde plus durable.
A l’affût des talents créatifs In Seine-Saint-Denis…
Le 12 octobre à Montreuil, Marius Hamelot sera un des jurés du Concours de design upcyclé in Seine-Saint-Denis organisé avec la Maison Montreau. « C’est le genre de concours qui colle parfaitement avec les qualités du Pavé® qui se travaille tout aussi facilement que le bois, tout en gardant les propriétés de modelage liés aux thermoplastiques. Donc, pour les designers, ça peut être un terrain de création nouveau et on commence déjà à collaborer avec eux », explique Marius Hamelot. Qui scrutera donc à Montreuil le talent de créateurs susceptibles de sublimer l’usage de son Pavé®.
Frédéric Haxo
Crédits photo : Bruno Lévy pour In Seine-Saint-Denis